PHOTOSENSIBILISATION DU CHEVAL : EFFETS DES UV
Pendant l’été, en plus des parasites, des problèmes de photosensibilisation apparaissent avec les rayons du soleil. Les animaux au pré sont particulièrement sensibles à ce problème, y compris les équidés. Ces lésions sont généralement confondues avec des coups de soleil ou des problèmes tels qu’une dermite estivale, pourtant leur origine principale est bien différente. Un traitement adapté est nécessaire car, pour les cas les plus graves, certaines lésions peuvent être irréversibles !
La photosensibilisation correspond à l’ensemble des réactions cutanées liées à l’interaction des UV avec une substance photosensibilisante contenue dans la peau de l’animal. Ce type de substance n’exerce une action qu’en présence de rayons UV c’est-à-dire à l’exposition de la peau aux rayons du soleil. Cette photosensibilisation s’accompagne souvent d’une photodermatose, c’est-à-dire un ensemble de démangeaisons cutanées, aussi appelées prurit, et de lésions plus ou moins importantes et plus ou moins profondes selon le type de photosensibilisation rencontrée. Les symptômes sont directement visibles : des plaies, des ulcérations, le cheval se gratte très fréquemment, des irritations… Cette réaction peut souvent être confondue avec un simple coup de soleil mais c’est tout à fait différent et le traitement l’est aussi !
Quelles parties du corps sont particulièrement touchées et à quelle période ?
Les zones touchées sont généralement celles qui sont dépigmentées c’est-à-dire les balzanes et la tête en général mais cette réaction peut aussi avoir lieu sur tout le corps pour les chevaux cremellos, albinos ou pie par exemple ! En effet, ces zones sont à surveiller, la peau y est plus fragile et plus sensible aux UV.
De plus, des zones sensibles pigmentées peuvent aussi être touchées comme le bout du nez, ensuite la lésion peut s’étendre à tout le corps de l’animal pour une atteinte forte. La photosensibilisation est plus fréquente au printemps et en été à cause du développement des plantes photosensibilisantes et de l’augmentation de l’ensoleillement durant cette période.
La photosensibilisation par le contact
Les substances sensibilisantes peuvent se retrouver dans l’épiderme par contact direct en application externe (huiles essentielles, crème, contact avec la plante au pré par exemple). On distingue, dans la photosensibilisation de contact :
- La photoallergie : assez rare, la substance en cause n’est pas photosensibilisante en elle-même mais chaque individu est différent donc chaque individu réagit selon sa sensibilité à la substance. La photoallergie dépend de chaque individu et de ses prédispositions. La substance en cause est dite photoallergène, elle devient toxique sous l’action des UV quelques jours après le contact en général. Une petite quantité suffit à déclencher la photoallergie. Elle se manifeste par des plaques d’eczéma sur les zones touchées, qui peuvent s’étendre aux zones les moins sensibles à proximité. Parmi les nombreux exemples de plantes en cause, nous pouvons mentionner la chicorée sauvage, le pissenlit et le laurier noble.
- La phototoxicité : plus fréquente que la photoallergie, cette réaction ressemble fortement à un coup de soleil avec des échauffements, et parfois des cloques. Il s’agit d’une réaction rapide et locale qui ne s’étend pas. On retrouve ce genre de lésions souvent au bout du nez quand le cheval explore son milieu et est en contact avec une plante phototoxique. Les substances en question, comme les psoralènes et le bergaptène, proviennent généralement de la sève des végétaux. Peuvent être en cause l’arnica, les ombellifères et les rutacées comme les agrumes par exemple. Ainsi, le pré du cheval doit être particulièrement surveillé et traité en conséquence.
La photosensibilisation par ingestion
Comme son nom l’indique, la photosensibilisation par ingestion correspond à l’entrée de la substance photosensibilisante par consommation en grande quantité de celle-ci. Les symptômes sont visibles au bout de quelques jours. Des lésions dermatologiques douloureuses apparaissent, avec une rougeur congestive de la peau à proximité. Elles sont accompagnées de croutes suintantes avec parfois des ulcères et un fort dessèchement de la peau. Ces lésions peuvent même s’étendre aux zones pigmentées à proximité.
Le mécanisme est le suivant : après ingestion en grande quantité de la plante, les pigments de celle-ci s’accumulent. Il s’agit généralement de la substance photodynamique qui cause les réactions cutanées, par exemple la phyllo-érythrine qui vient de la chlorophylle. Ils vont être emmenés par le sang jusqu’aux tissus cutanés. Avec le soleil, les pigments vont libérer de l’énergie en très grande quantité et donc endommager les cellules qui les abritent et les cellules environnantes. Cependant, pour causer des lésions cutanées, il faut une grande quantité de pigments donc une grande quantité d’aliment ingéré !
Une autre source peut être à l’origine de la photodermatose de votre cheval comme une anomalie de l’élimination des pigments. Normalement, le pigment, après la digestion, va directement vers le foie pour être éliminer dans le crottin. Si ce système ne fonctionne plus correctement, à cause d’un virus par exemple ou d’une intoxication, il peut causer une accumulation de substances photodynamiques dans les tissus. Si il s’agit du foie qui sature et qui n’arrive plus à éliminer, des signes sont observables comme une perte d’appétit, un amaigrissement et le blanc de l’oeil qui est plutôt jaune. Une intoxication du foie peut être dû à des bactéries, des champignons ou des algues d’eau qui se développent très bien avec des céréales mal stockées en conditions de chaleur humide. Toutes les plantes peuvent causer ce type de photosensibilisation mais certaines, comme le trèfle blanc ou la luzerne, sont particulièrement actives.
Si vous suspectez un problème au foie, il faut appeler votre vétérinaire. Dans les cas les plus graves, les lésions peuvent être irréversibles donc un traitement adapté dès les premiers signes est indispensable !
Que faire quand la photosensibilisation apparaît ?
Il faut d’abord éviter tout contact avec les UV et donc le soleil : le cheval doit rester au box ou à l’ombre ou alors il doit être couvert avec des couvertures et masques type anti-mouche.
Selon le type de lésions :
- Pour de simples lésions dermatologiques avec rougeurs, il faut appliquer une crème apaisante adaptée aux chevaux. Il faut absolument proscrire les crèmes cosmétiques qui peuvent contenir des parfums qui peuvent empirer la blessure, ainsi que les produits classiquement appliqués sur les brulures comme l’aloe vera pour les chevaux qui restent au pré. Enfin, il faut éviter les produits à base d’arnica qui, comme vu précédemment, est une plante photosensibilisante.
- Pour des croutes / ulcérations, il faut nettoyer la peau des zones atteintes et appliquer un cicatrisant. Il faut également éviter toute exposition avant cicatrisation.
- Pour des lésions étendues, il faut appeler le vétérinaire. Une photosensibilisation par ingestion est sans doute en cause, cherchez donc les causes possibles !
Enfin, si vous repérez au pré une plante photosensibilisatante, il est essentiel de l’éliminer. Le traitement du pré est parfois indispensable.
Vous avez désormais entre les mains les principales clés pour déceler tout problème de photosensibilisation chez votre cheval, en trouver l’origine et éventuellement l’éviter pour les mois qui suivent. N’hésitez pas à vous tourner vers votre vétérinaire pour toute question supplémentaire ou pour les cas les plus graves.
Comment l’éviter ?
Certains médicaments ou produits topiques peuvent photosensibiliser la peau de votre cheval. L’utilisation de certaines huiles essentielles sont souvent en cause. En effet, beaucoup d’huiles essentielles sont utilisées en tant que répulsif contre les insectes et sont en général photosensibilisantes, comme celles d’agrumes, de tagète ou de citronnelle.
De plus, les chevaux au pré doivent avoir accès à des zones à l’abris du soleil, idéalement naturels, comme des arbres. Pour ceux au box, il vaut mieux les sortir le matin tôt ou tard le soir, ou même pourquoi pas la nuit au pré et la journée au box. Enfin, quand ils sont dehors, il faut savoir protéger les zones à risque avec de la crème solaire adaptée plusieurs fois dans la journée.
L’utilisation de couvertures spécifiques est vivement conseillée, en combinant avec un masque. Les masques couvrant le bout du nez et les zones les plus sensibles sont à privilégier.
Il faut également veiller à ne pas donner à votre cheval des médicaments photosensibilisants. Apprenez à regarder votre cheval au pré et le pré en lui-même : les boutons d’or ou les pissenlits sont fortement photosensibilisants en grande quantité !
Enfin, certains chevaux ont la peau plus sensibleque d’autres comme les chevaux d’origine américaine et les chevaux près du sang (pur-sang anglais, anglo-arabe…). Des précautions doivent donc être mises en place.
Charlotte Bernard
Elève vétérinaire