Dent du cheval et mastication

Il est désormais reconnu que la bouche de notre cheval a une grande influence sur sa santé en général mais aussi sur ses qualités équestres.

Chaque année, nous faisons appel à notre dentiste équin en croisant les doigts qu’il ne trouve rien d’alarmant. Approchons nous plus près de l’anatomie et du fonctionnement de notre équidé pour comprendre comment se comporte sa bouche et de quelle manière en prendre le plus grand soin.

Dent du cheval et mastication - Le Paturon

Comment s’appelle les dents des chevaux ?

La première chose à savoir est que le cheval a une croissance continue de ses dents. Autour de la dent, on distingue la couronne clinique qui est la partie visible de la dent et la couronne de réserve qui s’étend de la gencive à la racine. La croissance continue de la dent lui empêche d’avoir un réel collet dentaire (à l’inverse de l’homme).

Une dent est composée de 3 éléments :

  • L’émail qui est constitué de 95 à 98% de matières inorganiques. La très petite quantité d’eau rend cette structure très fragile et cassante. L’organisme ne sait pas la régénérer ;
  • La dentine ou ivoire est composée de 70% de matières inorganiques, 20% de matières organiques et 5% d’eau. On distingue deux sortes de dentines : La dentine primaire forme la structure de la dent tandis que la dentine secondaire forme des tubules dans la dentine primaire, afin de régénérer la structure de la dent lorsqu’il y a des lésions. La sensibilité de la dentine est très faible chez le cheval ;
  • Le cément est composé de 45% de matières inorganiques, 45% de matières organiques et 10% d’eau. Il permet de maintenir la dent dans son alvéole.

La pulpe est un réseau tissulaire permettant d’alimenter la dent. Elle contient les vaisseaux sanguins et les nerfs. Elle se localise dans le canal radiculaire. Les molaires peuvent en avoir 2 à 3 par dent.

Comment poussent les dents des chevaux ?

Comme nous l’avons dit, les dents du cheval ont une croissance continue, excepté pour les canines.

C’est le mécanisme de synthèse et de dégradation du cément qui permet à la dent de s’adapter à sa croissance continue. Le cheval adulte possède 40 dents :

  • 12 incisives (6 supérieures et 6 inférieures) dont le rôle est de prendre et de couper les aliments à ras. En partant du milieu de la face vers l’externe, on distingue la pince, la mitoyenne et le coin ;
  • 4 canines appelées également dents de hongre ou dents d’étalon. Elles ne sont pas toujours présentes chez les mâles et très rarement chez les juments (les juments possédant des canines sont dites Bréhaignes). Elles servaient de moyen de défense chez l’ancêtre du cheval moderne. Actuellement elles n’ont plus de fonction ;
  • 12 prémolaires servant à broyer très finement les particules alimentaires ;
  • 12 molaires ayant également pour rôle le fin broyage des particules alimentaires.

Est-ce que un cheval perd ses dents ?

Voici un récapitulatif de l’apparition et la chute des dents de lait, et l’éruption des dents d’adulte en fonction de l’âge. Ce sont des valeurs moyennes qui peuvent varier d’un individu à un autre.
  • Eruption des dents déciduales :
    • Pinces > 6 jours ;
    • Mitoyennes > 6 semaines ;
    • Coins > 6 mois ;
    • Prémolaires > Première semaine de vie.
  • Chute des dents déciduales :
    • Pinces > 2 ans ;
    • Mitoyennes > 3 ans ½ ;
    • Coins > 4 ans ½ ;
    • PM1 > 2 ans ½ ;
    • PM2 > 3 ans ;
    • PM3 > 4 ans.
  • Eruption des dents permanentes :
    • M1 > 1 an ;
    • M2 > 2 ans ;
    • M3 > 3 ans ;
    • Canine > 4 à 6 ans ;
    • Dent de loup > 6 mois à 1 an.

La table dentaire du cheval s’use de 2 à 3 mm par an. La surface d’occlusion (zone où les dents se touchent) d’un jeune cheval est entièrement recouverte de cément. Avec l’usure, elle disparait et laisse apparaître les surfaces irrégulières des dents. Ces irrégularités vont permettre un broyage très efficace des aliments. Après avoir percé, il faut 6 mois aux dents permanentes pour venir en occlusion.

La dent de loup se place en avant de la première prémolaire. Elle possède rarement une racine et n’a plus sa fonction de défense comme chez l’ancêtre de notre cheval. Avec le temps, les incisives s’aplatissent et prennent une forte inclinaison horizontale.

Les molaires supérieures possèdent 3 racines tandis que les inférieures n’en possèdent que 2. Les premières molaires sont inclinées vers l’arrière et les dernières sont inclinées vers l’avant. Ceci permet d’avoir une importante pression des dents, augmentant la résistance de la table dentaire. De plus, l’accolement étroit des dents diminue le risque d’infection des alvéoles.

A 7 ans, la position des incisives inférieures se modifie et tend vers l’horizontal. Les coins inférieurs ne sont plus en occlusion qu’à 50% avec leurs homologues. Il se forme alors une queue d’Aronde vers 9 à 10 ans. A 12 ans, les incisives supérieures réalisent le même mouvement et la queue d’Aronde disparaît. Ce phénomène se reproduit vers 16 ans puis vers 20 ans.

Avec l’âge, les incisives passent d’une forme ovale à une forme triangulaire. Un jeune coin est plus large qu’il n’est long. A partir de 10 ans, cette proportion s’inverse.

A partir de 10 ans, une cannelure ou signe de Galvaye apparaît à la racine du coin supérieur.

A 15 ans, elle atteint la moitié de la dent et à 20 ans, elle court sur toute la longueur de la dent.

Le cornet initialement présent sur les dents tend à disparaître lorsque la dent pousse. Le tunnel se rétrécit petit-à-petit pour ne laisser qu’une trace. La pulpe dentaire, recouverte de cément, devient exposée lorsque la dent pousse. Il apparaît alors l’étoile dentaire située en face labiale.

Un cheval perd-il ses dents - Le Paturon

Qu‘est-ce qu’une surdent cheval ?

30% de la table dentaire supérieure sont en contact avec les dents de la mandibule, car le maxillaire est plus large que la mandibule.

Les molaires ont une inclinaison de 10 à 15% avec l’horizontal. De ce fait, des surdents apparaissent sur les molaires supérieures en face labiale et plus rarement sur la face linguale des molaires inférieures. Les surdents s’observent chez quasi tous les chevaux âgés et sont liées à une mastication irrégulière.

Les rampes et pics peuvent se situer à l’avant ou à l’arrière, en haut et en bas des premières et dernières molaires.

Souvent, le problème se produit lorsque le maxillaire est légèrement avancé par rapport à la mandibule. La dernière molaire et la première prémolaire ne sont plus en total contact avec leur homologue. Le problème est plus important mais plus rare dans le cas de prognathisme.

Le cheval peut également être atteint d’abcès, de caries, de fractures dentaires, de tartre ou encore de maladies parodontales.

Entre 2 et 6 ans, il est possible d’observer des bosses sous la mandibule qui peuvent être douloureuses. Elles correspondent à une réaction inflammatoire de la pousse des dents, à ne pas confondre avec un kyste.

Comment le cheval s’alimente ?

Les dents ne sont pas les seuls outils qui permettent à nos chevaux de manger. D’autres structures anatomiques entrent en jeu lors de ce procédé :

  • Les lèvres : Elles sont au nombre de deux (une supérieure et une inférieure). La face interne est tapissée par la muqueuse buccale tandis que la face externe est recouverte de poils fins et de longs poils tactiles. Le rôle des lèvres est de faire le tri lors de la préhension des aliments ;
  • Les joues : Leur rôle est de pousser les aliments vers la face triturante des molaires pour qu’ils soient broyés ;
  • Le palais dur : Il mesure environ 27 cm chez le cheval. Il est constitué de nombreuses crêtes palatines qui vont orienter la progression des aliments vers le pharynx ;
  • Le voile du palais : C’est une cloison musculo-membraneuse qui sépare la bouche du pharynx. En association avec l’épiglotte, il régule le transit entre l’œsophage et la trachée. Lorsque des aliments touchent le voile du palais, il se produit une élévation du palais mou et une fermeture de l’épiglotte, qui envoie le bol alimentaire vers l’œsophage. Le reste du temps, l’épiglotte reste ouverte et l’air circule en direction de la trachée. L’épiglotte est très développée chez le cheval, ce qui ne lui permet pas de respirer ni de régurgiter par la bouche ;
  • La langue : Elle mesure 40 cm de long pour un poids moyen de 1 200 g. Elle est recouverte de papilles qui ont un rôle mécanique, tactile et gustatif. Son rôle est le brassage des aliments dans la cavité buccale ;
  • Les glandes salivaires : Leur rôle est de sécréter la salive qui va permettre d’humecter la muqueuse orale et fluidifier les aliments avant leur ingestion. Il existe plusieurs glandes salivaires : les labiales, les palatines, les buccales, les linguales, la parotide, la sublinguale et la mandibulaire. Le cheval sécrète environ 50 L de salive par jour ;
  • L’ATM (Articulation Temporo-Mandibulaire) : Elle correspond à l’articulation qui maintient la mandibule au reste du crâne. On distingue l’ATM droite et l’ATM gauche. Elles ont un rôle primordial dans le processus de mastication des aliments puisqu’elles permettent l’ouverture et la fermeture de la mâchoire.

L’ensemble de ces structures a un rôle important dans la préhension, la mastication et la déglutition des aliments. Si une structure ne fonctionne plus bien, les aliments ne pourront pas être finement mâchés.

Comment se déroule la mastication chez le cheval ?

La mastication des aliments résulte de l’association de plusieurs mouvements combinés. C’est la mandibule qui se mobilise par rapport au maxillaire, qui lui, reste fixe.

La mandibule peut donc s’ouvrir (mouvement passif) et se fermer, elle peut aller d’avant en arrière (propulsion/rétropulsion) et de droite à gauche ou de gauche à droite (diduction).

Lorsque le cheval mange, tous ces gestes se combinent pour former un mouvement hélicoïdal (forme de 8) asymétrique. La mastication se fait d’un côté puis de l’autre.

Quels sont les dangers d’une mauvaise mastication cheval ?

Un souci dans la mastication provoque un mauvais broyage des aliments et donc une mauvaise dégradation et une mauvaise assimilation des nutriments dans tout le tube digestif (de la bouche au rectum).

Ainsi, des problèmes de santé tels que des coliques, des ulcères, des diarrhées, des constipations, des gaz trop importants, une perte d’état, des parasites intestinaux, un surpoids, des problèmes de peau et de poils, des fourbures ou encore des boiteries peuvent s’expliquer par une mauvaise mastication des aliments !

Quelles sont les causes d’une mauvaise mastication cheval ?

Il est difficile de trouver la cause d’une mauvaise mastication… Le plus évident reste un problème dentaire. Une irrégularité des tables dentaires, des surdents, des fractures dentaires, des abcès, des carries ou des tumeurs dentaires peuvent provoquer une douleur lors du broyage des aliments. Le cheval abrège alors cette étape et les aliments ne sont pas suffisamment mâchés.

Une plaie ou une infection des structures annexes peuvent aussi créer une douleur qui altèrera le mécanisme de mastication. Par exemple, un brin de paille planté dans le palais, une brûlure des lèvres ou une piqûre d’insecte sur les gencives.

Un blocage ostéopathique de l’ATM, de l’os hyoïde (os qui tient la langue) ou de l’articulation entre le crâne et la première cervicale peuvent être une cause de mauvaise mastication. Une fois la cause trouvée, il faut déterminer l’origine de son apparition… Or, dans certains cas, nous n’y parvenons pas.

Un abcès dû à un corps étranger est souvent la faute à « pas de chance ». Mais parfois, nous provoquons nous-même les blessures de nos chevaux. La présence de surdents chez le cheval est essentiellement due à l’alimentation que nous leur donnons. Nos herbivores sont fait pour manger des fourrages environ 15h par jour ! Trois repas prémâchés et ingurgités en 5 minutes n’ont donc pas le même effet sur leurs dents. Le cheval doit manger des aliments ligneux et en grande quantité s’il veut user ses tables dentaires correctement. Les muserolles et les têtières trop serrées provoquent des blocages des ATM et des inflammations des glandes salivaires. Certains chevaux n’arrivent presque plus à ouvrir la bouche ! Ne pas tirer sur les langues de vos chevaux et encore moins les attacher. En plus de la douleur que cela crée, l’os hyoïde se bloque quasi systématiquement. L’anatomie de la bouche est faite pour que le cheval mange tête en bas. Lorsqu’il mange avec la tête en l’air, la mandibule glisse vers l’arrière (c’est l’inverse lorsque le cheval broute au sol), les tables dentaires ne sont alors plus bien alignées et il se crée des tensions pathologiques au niveau des ATM.

Pathologies dentaires et lésions ostéopathies ont une action réciproque. C’est-à-dire qu’un problème dentaire aura des conséquences directes sur les structures tissulaires et articulaires du corps, notamment les os de la tête et les cervicales. Inversement, des blocages articulaires peuvent créer des problèmes dentaires (mauvais alignement dentaire, surdents).

Il faut noter que tout verrouillage articulaire peut être la cause d’un déséquilibre dans la bouche du cheval. Un blocage de la hanche, du bassin ou du dos crée des tensions pathologiques dans tout le corps qui peuvent se compenser au niveau des ATM. Le cheval a donc une mastication asymétrique ce qui entraîne une usure irrégulière des dents avec apparition de rampes et de surdents. Les aliments sont alors mal broyés et moins bien digérés dans le tube digestif. Les nutriments sont de ce fait moins bien assimilés par l’organisme. Tout cela peut se traduire par une perte d’état chez le cheval et des coliques récidivantes. Dans cet exemple, de gros troubles digestifs s’expliquent par une hanche bloquée ! Ce n’est pas le schéma le plus classique, mais il peut se produire. Il est donc important de bien faire suivre votre cheval par un ostéopathe et un dentiste équin. L’un ne va pas sans l’autre. Ainsi, des problèmes dentaires récurrents pourront disparaître avec l’aide de votre ostéopathe et inversement (même si de nombreux autres paramètres entrent en jeu).

France Le Peru, ostéopathe animalier dans le 77, 89, 45, 10, 91 et 94.

Sources : Soigner les dents de son cheval, Dr Kreling/Cours système digestif des équidés, ESAO.

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